Réflexions sur une éventuelle mise sur pied de la boxe anglaise du troisième âge.

Le 2 juin 2006 à Chicago, Michael Tarnoff (68 ans) et Larry Feldman (63 ans) se sont affrontés au cours d'une réunion de boxe anglaise. Le présent article initie l'étude de faisabilité de la mise sur pied de la boxe anglaise du troisième âge en France.

1. Les performances restent-elles intactes au cours du troisième âge?

Au delà de l'âge adulte, plus le sujet prend de l'âge, plus ses performances physiques et mentales diminuent. Tout de suite, quelques exemples de diminutions et leurs conséquences.

La perte de la masse musculaire cause la diminution de la force et de l'endurance.

Le raidissement de la cage thoracique rend difficile l'exécution de certains mouvements tels que les esquives.

La perte progressive de la matrix et des minéraux osseux rend les os de plus en plus vulnérables à la fracture.

Les efforts expiratoires importants augmentent la probabilité d'un collapsus des voies aériennes.

Le viellissement cérébral rend infidèle la mémoire à court terme et difficile l'apprentissage de nouvelles tâches.

La détérioration de la vision n'est probablement pas sans conséquences désagréables en boxe anglaise où la visite chez l'ophtalmologue est obligatoire chaque saison sportive, c'est-à-dire chaque année civile.

L'augmentation de la probabilité des chutes rend difficile l'accomplissement des tâches qui font intervenir un contrôle permanent de l'équilibre.

Le vieillissement du système endocrinien rend difficile la régulation du milieu intérieur lors des exercices prolongés.

La détérioration de diverses composantes du système immunitaire peut amoindrir la vitesse des réparations tissulaires rendues nécessaires par des exercices quantitativement importants.

2. Est-il possible de pratiquer la boxe anglaise au cours du troisième âge?

Les personnes âgées peuvent prendre part, en toute sécurité, à des programmes d'entraînement à des activités physiques modérées. Dans de nombreuses fonctions biologiques, les pourcentages des améliorations induites par l'activité physique sont assimilables à ceux présentés par les jeunes adultes.

L'existence du clip ci-dessous est une preuve que, parmi les personnes du troisième âge, il est possible de délivrer des licences de boxe anglaise.


Michael Tarnoff (68 ans) opposé à Larry Feldman (63 ans) le 2 juin 2006 à Chicago.



3. Que gagnerait-on à pratiquer la boxe anglaise au cours du troisième âge?

Un programme d'entraînements approprié peut prévénir tant les insuffisances de fonctionnement de divers systèmes physiologiques que les effets d'un certain nombre de maladies débilitantes.

Parmi les bienfaits immédiats résultant de l'activité physique régulière, on peut citer le mieux-être, l'augmentation de l'auto-estime, un sentiment d'auto-suffisance et la diminution des risques d'anxiété et de dépression.

Une réduction de l'âge biologique de dix à vingt ans a été observée chez des personnes âgées suivant un programme d'entraînements. Aucun remède pharmacologique connu n'est aussi sûr que l'activité physique modérée pour réduire l'âge biologique d'une personne et améliorer qualitativement son vécu quotidien.

Au troisième âge, il n'est pas exclu que nombreux soient ceux qui rêvent d'être respectés des personnes du même sexe et d'être la coqueluche des personnes du sexe opposé. Ils sont, nous croyons, prêts à se disputer une couronne mondiale ou tout au moins une couronne départementale de boxe anglaise pour réaliser leur rêve. Il est donc souhaitable que la Fédération Française de Boxe Anglaise en étudie la faisabilité.

4. Que faire des risques inhérents à la pratique de la boxe anglaise au cours du troisième âge?

L'activité physique excessive peut causer chez les personnes âgées des catastrophes cardiaques, des lésions de muscles squelettiques et la suppression de la fonction immunitaire.

La diminution de la force physique dans la population concernée réduirait la puissance des coups de poing. Théoriquement, cela offre une sécurité pour la personne qui reçoit les coups. Mais il reste à savoir si la sensibilité à ces derniers n'augmente pas avec l'âge. L'usage du casque intégral du type boxe pré-combat serait une protection supplémentaire.

La diminution de l'endurance devrait conduire à une diminution tant de la durée de chaque reprise que de la durée totale de l'affrontement.

Certaines esquives sont rendues difficiles par le raidissement de la cage thoracique. La défense par déplacements partiels ou totaux d'appuis (décalages, retraits, ...) est relativement dangereuse à cause de la difficulté permanente de contrôler l'équilibre même dans des situations non stressantes. Travaillant avec une personne qui accuse à la balance plus de dix kilos que nous, lorsque nos blocages nous défendaient efficacement, nous devions en revanche fournir beaucoup d'effort pour ne pas tomber à cause du déséquilibre que nous imposaient les puissants coups de poing adverses. Chez les boxeurs du troisième âge, il faudra par conséquent réduire de façon importante la différence de poids entre les deux limites de chaque catégorie de poids pour permettre ne fut-ce qu'une défense par blocage.

La fragilité osseuse accrue devrait être dans la mesure du possible prévenue même par l'usage des médicaments. Qu'on ne nous parle pas de dopage car cela se ferait chez les deux protagonistes de l'affrontement pour raisons de santé et sans préjudice pour l'un d'eux au profit de l'autre. Un contrôle régulier de la densité osseuse contribuerait aussi à la prévention. Nous ne souhaitons pas que nos futurs licenciés souffrent de fractures lors, par exemple, d'une défense par chassé ou de l'exécution d'une technique d'attaque comme cela est arrivé à un jeune pratiquant d'une discipline sportive proche de la nôtre (sa propre attaque lui a cassé la jambe utilisée; voir le clip ci-dessous).


L'attaque s'est trompée de victime.



Dans le clip issu de l'affrontement entre deux sexagénaires, nous voyons entre deux reprises un des protagonistes expirer fortement. Est-ce spontané à cause de l'effort fourni ou est-ce voulu pour éliminer l'excès de gaz carbonique des voies aériennes? Dans l'un ou l'autre des deux cas, le risque de collapsus des voies aériennes reste présent. Pour éliminer l'excès de gaz, nous pensons qu'il est bon que les soigneurs assistent la ventilation des boxeurs par des techniques existantes ou à mettre au point.

L'apprentissage de nouvelles tâches étant devenue difficile, l'encadrement des personnes du troisième âge devra être confié à un personnel préparé à cet effet.

La visite annuelle à l'ophtalmologue devrait déterminer si la détérioration de la vision n'est pas incompatible avec la pratique de la boxe anglaise.

La régulation du milieu intérieur et les réparations tissulaires s'étant ralenties, le temps de repos entre deux reprises, entre deux séances d'entraînements ou entre deux affrontements devrait être revu à la hausse.

5. Souhait.

Si tous les risques qu'encourt un pratiquant de boxe anglaise du troisième âge peuvent être maîtrisés, nous souhaitons que soient délivrées des licences de pratique aux candidats issus de cette population.

6. Ouvrage consulté:

Shephard R.J. (1997) Aging, Physical Activity, and Health, Human Kinetics, Champain, 487 p. (pp. 137, 138, 197, 324, 348 et 375).

André MUKALA NSENGU TSHIBANGU,
Prévôt Fédéral, Juge et Directeur d'Assaut.